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ISSN 2496-9346

mercredi 25 mars 2015

Ernest Blum, L'Histoire en l'an 2000 (1889)

Le regard rétrospectif fictif est souvent un moyen efficace pour se moquer de l'actualité contemporaine. Alors que les prétendants au trône se déchire pendant que la Troisième République s'installe, Ernest Blum imagine le regard que porteront les historiens de l'an 2000 sur cette querelle.

 L'Histoire en l'an 2000

Ou comme quoi M. le comte de Paris rendra besogne dure aux commentateurs de l'avenir.

...Arrivons maintenant aux événements qui marquèrent la fin du dix-neuvième siècle.
À la mort du comte de Chambord, petit-fils de Charles X et fils du duc de Berry, Philippe VII devint le chef platonique de la maison de France. Le parti légitimiste le reconnut, en effet, comme tel, mais un nommé Louis-Philippe Il tenta de disputer ce titre au nouveau chef.
Philippe VII, fort de ses droits, ne céda pas, et la lutte entre les deux prétendants fut vive.
Ce fut alors que, comme dans la fable, surgit un troisième larron qui essaya de profiter de la division des deux parents, et ce troisième larron s'appelait Philippe.
Qui aurait le droit de porter les trois fleurs de lys d'or? qui serait le chef des royalistes de France? Est-ce Philippe VII, Louis-Philippe II ou Philippe?
L'opinion de certains chefs de groupes d'alors était bien que la succession politique du comte de Chambord défunt devait revenir au comte de Paris, petit-fils de Louis-Philippe Ier et fils du duc d'Orléans ; mais nul ne savait au juste le vrai nom du comte de Paris, — l'histoire n'est même pas parvenue à nous transmettre intactes les appellations de ce rejeton de princes.
Se nommait-il Henri, Honoré, Alfred ou Louis? II ne faut, pas avoir quelquefois trop de noms, sous peine de n'en laisser aucun.
La vie du reste fort obscure du comte de Paris — puisqu'elle s'est consumée dans l'attente de la disparition de la troisième République sous laquelle nous vivons encore aujourd'hui — n'a permis à aucun écrivain du temps de tenter une biographie sérieuse dudit comte.
Quant au combat qu'il faudrait appeler le combat des trois-Philippe, Pililippe VII, ,Louis-Philippe II et Philippe, il se termina également comme dans la fable, par la mort des trois combattants. Un jour on ne trouva sur le champ de bataille que les trois couronnes de ruolz que les trois prétendants s'étaient fait faire chacun à bon marché et comme pour en imposer aux masses….

Ernest Blum, « L'histoire en l'an 2000 » in Le Rappel, n° 4927, daté du 6 septembre 1889.



mercredi 18 mars 2015

Pellos et Jean Silvere, Durga-Rani, reine des jungles (1947)



mardi 17 mars 2015

Clément Vautel, « Comment voyez-vous Paris dans 50 ans ? » (1929)

Clément Vautel a écrit de nombreuses nouvelles, souvent humoristiques, relevant de la conjecture rationnelle.
Quand Jacques Cervière lui demande en 1929 « Comment voyez-vous Paris dans 50 ans?» , voici ce qu'imagine Clément Vautel:



Notre confrère Jacques Cervière du Petit Journal, me pose cette question :
« Comment voyez-vous Paris dans 50 ans ? »
- Belle occasion de nous livrer au jeu des anticipations à la Robida et à la Wells. Imaginons un Paris hérissé de gratte-ciel qu'unissent des passerelles vertigineuses et que survolent des nuées d'aérocars. Il y a aussi un Paris souterrain où les besognes utilitaires s'accomplissent dans de vastes usines : c'est là, par exemple, que se prépare, selon la loi du communisme scientifique, la nourriture — tant de calories par tête du troupeau des administrés.
Quelques monuments du passé ont été conservés au milieu de squares, immenses où la mort du dernier moineau a suivi de près la disparition, du dernier cheval.
Mais, en un demi-siècle, Paris ne peut se transformer aussi radicalement, même si notre progrès met les bouchées doubles ou triples.
En 1979, la Ville-Lumière aura sans doute, dans l'ensemble, un aspect extérieur assez peu différent de celui qu'elle offre aujourd'hui.
Elle se sera étendue vers l'ouest, et le rond-point, des Bergères, à Courbevoie, sera ce qu'est aujourd'hui la place de l'Etoile.. Celle-ci ressemblera à l'actuelle place de l'Opéra. Le Soldat inconnu, ne pouvant reposer au milieu d'un carrefour entouré de cafés, de théâtres, de grands magasins, se sera réfugié aux Invalides : espérons qu'aucune « dernière guerre » ne lui aura fourni l'occasion d'être moins seul.
Le centre de Paris sera, comme la Cité de Londres, composé exclusivement d'immeubles commerciaux. Partout des buildings, des banques ! Les bureaux américains et les coffres-forts auront définitivement remplacé les lits où les Parisiens d'autrefois naissaient, aimaient et mouraient. Paris comptera huit ou dix millions d'habitants, dont cinq cent mille nègres.
On parlera encore français sur les bords qu'arrose la Seine, mais, dans certains quartiers — les plus beaux — tout le monde parlera anglais avec l'accent américain.
Comment subsistera cette cité monstrueuse dans un pays où les meilleures terres resteront en friche ? Je l'ignore.
Paris, avec tout son luxe, tout son confort raffiné, ne sera même pas assuré de son pain quotidien, et ce sera la revanche de la nature sur une civilisation exagérément orgueilleuse et artificielle.
Cçpendant Paris gardera ses caractéristiques traditionnelles, car les villes ne changent pas d'âme à travers les révolutions scientifiques ou politiques : nos petits-neveux seront comme nous capricieux, fantaisistes, un tantinet frivoles, et la Parisienne n'aura rien perdu de ce je ne sais quoi qui la rend inimitable.
Tels sont mes pronostics pour l'an 1979, — mais je répète qu'il faudra, heureusement, plus d'un demi-siècle pour les réaliser tous.
Qui sait d'ailleurs, si, d'ici là, nous ne nous dégoûterons pas d'un progrès tout matériel qui n'ajoute rien à notre bonheur et multiplie les problèmes sans leur donner jamais des solutions satisfaisantes ? Il y aura peut-être un revenez-y à la bonne loi naturelle, un dégoût de la vie trépidante, une résurrection de la vraie sagesse. Même si c'est peu probable, espérons ce miracle, ne serait-ce que pour, n'avoir pas trop à plaindre les Parisiens de 1979.


Chronique « Mon film » du 14 juillet 1929, Le Journal n° 13419

A lire:
Les Nouvelles conjecturales de Clément Vautel dans Galaxies Science Fiction n° 15
La Grève des bourgeois par Clément Vautel
Le Féminisme en 1958 par Clément Vautel 
Paris Futurs anthologie de textes consacrée aux Paris du futur imaginés entre 1851 et 1906 version numérique et version papier.

vendredi 13 mars 2015

Marquis de Dion, L'automobile et la guerre future (1906)

En 1906, le marquis de Dion propose au magazine Je Sais tout un long article intitulé L'automobile reine du monde superbement illustré par Henri Lanos. Il y décrit un avenir radieux pour la voiture (il est l'un des pionniers de l'industrie automobile).
La même année le périodique Le Voleur illustré propose un extrait de ce texte et la vision change radicalement car la partie sélectionnée est uniquement consacrée à la guerre future et à la part prise par l'automobile.


L'automobile Reine du monde





Nul doute de l'énorme accroissement que, dans un avenir prochain, est appelé à prendre la locomotion automobile. Le marquis de Dion, l'éminent promoteur de cette admirable industrie, veut bien donner ici un aperçu de son universelle prospérité future.


L'automobile et la guerre future.

Deux ou trois fois déjà, depuis dix ans, des expériences de mobilisation ont eu lieu. Et les automobiles de nos grands constructeurs, et même des particuliers, réquisitionnées comme jadis pouvaient l'être des chevaux, ont massé en quelques heures à la frontière tout un corps puissant, et par le nombre et par la rapidité de ses évolutions. Je me souviens qu'en 1905, un journal illustré s'était plu à imaginer ce que serait une mobilisation future. Et il me représentait, dans la grande cour de mon usine, entouré d'officiers prêts à partir dans les quelques cents voitures que je mettais à la disposition de l'armée française. Mes chefs de – service, mes meilleurs mécaniciens avaient sur la photographie « truquée » qui représen­tait cette scène, endossé l'uniforme et coiffé le képi.
Or, c'est aujourd'hui la réalité. Une mobili­sation générale comporte celle des automo­biles.
Quant à l'artillerie, elle compte maintenant en grand nombre les fameuses mitrailleuses blindées, filant à 50 à l'heure sur les routes, à 30 à l'heure dans les terres labourées. Le mécanicien conduit sans être vu, les artilleurs sont dissimulés dans leur tourelle à «éclipse». Et le tout, hommes, mitrailleuse, partie motrice de la machine, le tout est à l'abri des balles et des shrapnells qui viennent s'aplatir sur des blindages spéciaux, absolument invulnérables. De telles mitrailleuses automo­biles peuvent se déplacer avec une vertigineuse rapidité d'un point à l'autre du champ de bataille, secourir l'aile menacée, renforcer ensuite celle qui commence à perdre l'avan­tage et accentuer cet avantage de façon à assurer la victoire définitive.
Quant à l'infanterie, l'automobile est désor­mais pour elle d'une aide précieuse. Il y a encore vingt ans, les colonnes étaient encom­brées et retardées par les convois indispen­sables au ravitaillement en vivres et en muni­tions.
Maintenant ce sont des fourgons militaires à moteur robuste et régulier qui suivent l'in­fanterie sans la gêner, la précédant même chaque fois qu'il est nécessaire, évoluant dans un rayon d'action beaucoup plus étendu. Les « impedimenta »qui gênaient tant autre­fois l'infanterie n'existent plus.



En arrivant à l'étape, le soldat trouve sa soupe chaude, il n'est plus besoin comme autrefois qu'il la fasse lui-même dans la mar­mite qu'il portait sur son sac. En effet, chaque compagnie comme chaque batterie d'artillerie, du reste, a sa cuisine roulante automobile, qui a pu trouver en route le bœuf et les légumes nécessaires pour préparer, tout en roulant, le bon pot-au-feu qui fera oublier sa fatigue au soldat, au combattant. Ne riez pas! Il a été prouvé que cette question, suivant qu'elle était bien résolue ou non, pouvait influer sur le résultat des opérations en temps de guerre. Au lendemain de la guerre russo- japonaise, un écrivain militaire du temps, tout en signalant l'apparition des « marmites roulantes », mais non encore automobiles, rappelait que le 16 août 1870, à Rezonville, nos soldats commençaient à préparer leur soupe lorsque l'on cria « aux armes ! »
Ils combattirent le ventre vide, et bientôt les plus vaillants se trouvèrent démoralisés, incapables d'un nouvel effort. Le mot du maréchal Bugeaud est célèbre : « la soupe fait le soldat ! » Eh bien, maintenant, grâce à l'intendance automobile, à la cuisine roulante automobile, le combattant est toujours sûr d'avoir sa soupe chaude.

Et enfin, ceux de nos officiers qui sont chargés de diriger et de coordonner tous les mouvements de ces troupes, ont eux aussi, grâce au moteur, une mobilité d'action qui leur permet d'être partout à la fois, de sur­veiller par eux-mêmes les points sensibles, d'aller en un clin d'œil là où leur pré­sence est nécessaire. Ils ont à leur disposi­tion les meilleures voitures réquisitionnées au premier jour de la mobilisation; ils sont conduits par les plus fameux champions des grands concours de tourisme et d'endu­rance, ceux-là même qui autrefois triomphaient dans les défuntes coupes Gordon Bennett.


Ainsi tout l'ensemble de l'armée s'est mo­difié, la tactique moderne a des moyens nou­veaux à sa disposition, des moyens puissants dont elle sait user au mieux, grâce à toutes les successives expériences qu'ont permises les grandes manœuvres de chaque année depuis 1910 ou 1915
Voilà mon rêve! Voilà le rôle que jouera l'automobile dans quelque vingt-cinq ans- Ce rêve pousse peut-être un peu trop loin les choses, mais je suis certain que la réalité jus­tifiera la plus grande partie de ces imagina­tions quelque peu hardies à l'heure actuelle.

In Le Voleur illustré, n° 2549,  13 mai 1906

A lire:
Le texte complet est disponible sur le site Sur l'Autre face du monde


Merci à Blouzouga Memphis qui m'a rappelé les belles images d'Henri Lanos.

mardi 3 mars 2015

[illustrations] Christian Fontuge illustre Satellite sous contrôle de J. Carey Rockwell (1956)

En 1956 est publié la traduction de Danger in deep Space (Satellite sous contrôle) de J. Carey Rockwell. Cette édition chez Mame bénéficie des illustrations de Christian Fontuge.