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ISSN 2496-9346

mardi 31 décembre 2013

Enigme du lundi, réponse du mardi

L'énigme du lundi (celle d'hier) proposait cette image:


Extraite de l'encyclopédie Walt Disney "Explorons l'avenir" ( éditions Hachette / Le Livre de Paris, 1973), elle représente un avant-poste au coeur de forêt vierge. On y voit une autoroute, où circulent des voitures contrôlées électroniquement, qui assure les liaisons avec les grandes métropoles. L'avant-poste, sorte de comptoir colonial futuriste, permet de se loger. On y débite du bois précieux récolté dans la jungle. La légende précise en outre : "détail curieux: la maquette de la forêt compte trois millions de feuilles" .
Evidemment tout ceci n'est guère écologiquement correct dans nos années 2013-2014 !

Il existe d'autres images de ce type comme ces machines spéciales qui tranchent les arbres géants comme des fétus de paille à coups de rayons laser...



... ou cette maquette d'engin pour la construction de routes en Amazonie:


lundi 30 décembre 2013

Enigme du lundi : que représente cette image?

Dernière énigme du lundi de l'année 2013 avec cette image: que représente-t-elle?


Merci à tous ceux qui ont joué cette année, en 2014 de nouvelles énigmes du lundi sont prévues !

samedi 28 décembre 2013

Alexandre Raveleau, Nos Années Science-fiction ( 2013 )

La science-fiction à la télé ? Il y en a plein et depuis longtemps ! C'est en tout le sentiment que l'on a en parcourant Nos Années Science-Fiction.
Alexandre Raveleau nous offre un bel album abondamment illustré grâce auquel on se replonge avec délices dans les vieilles séries de SF, du Docteur Who au Prisonnier, de Cosmos 1999 aux Envahisseurs en passant par X-Files, V, La Quatrième dimension ou même Temps X...
Les textes nous permettent de resituer les séries ( en fait j'ai beaucoup vu de rediffusions et il y a parfois un décalage important entre la diffusion de la série dans son pays d'origine et en France) et on admire les nombreuses illustrations avec plaisir.
Il y a quelques petites madeleines à déguster et le livre m'a donné envie de revoir quelques séries.

Présentation de l'éditeur:
Si enfant vous rêviez d'habiter une base lunaire, de commander un vaisseau spatial, de voyager dans le temps, d'affronter des aliens cruels, de traverser des mondes parallèles alors cet ouvrage est fait pour vous. "L'espace, l'ultime frontière... " Ces premiers mots du générique de Star Trek raisonnent encore dans votre tête, cette série mythique totalement révolutionnaire pour l'époque (les années 60) a illuminé vos soirées et surtout votre imaginaire. Que ce soit Buck Rogers, le cosmonaute du 20ème siècle transporté en plein coeur du 25 ème siècle, l'équipe de la station lunaire Alpha de Cosmos 1999, les deux savants visionnaires de Au coeur du temps, l'équipage téméraire de Voyage au fond des mers, les héros incroyables de La Quatrième dimension ou le reporter David Vincent des Envahisseurs, ils ont tous marqué nos mémoires d'enfant ou d'adolescent.   La science-fiction est certainement le genre qui a le plus participé aux bouleversements culturels de la seconde moitié du 20 ème siècle. Les lecteurs, les cinéphiles comme les amateurs du petit écran ne voient plus le monde en deux  mais en trois dimensions. L'horizon est illimité, l'action est propulsée à la vitesse de la lumière. Costumes improblables, décors hallucinés, scénarios délirants, visions d'avenir franchement avant-gardistes... tous les ingrédients qui ont fait la magie de ces séries et films sont réunis dans cet album souvenirs pour vous téléporter loin de ce monde.

vendredi 27 décembre 2013

Pierre Mac Orlan, Les Plaisirs de la Campagne. Souvenirs de 2912


Description de cette image, également commentée ci-après
Pierre Mac Orlan est connu pour des textes relevant de la science-fiction et du fantastique aux côtés d'une vaste production (avec le célèbre Le Quai des brumes) où se mêlent romans d'aventures, contes humoristiques, chansons, essais, mémoires, reportages, etc.
Vers 1910 (sans doute 1912) paru le volume Contes de la pipe en terre ( éditions Librairie Ambert ) contenant « Les plaisirs de la campagne. Souvenirs de 2912 ». Le texte fut réédité au moins deux reprises: dans Le Journal Amusant (en 1928) et dans le Bulletin des Amateurs d'Anticipation Ancienne et de Littérature Fantastique n° 2 et 2 bis ( en 2000 ).
Dans ce conte humoristique, Pierre Mac Orlan imagine une campagne qui n'a plus rien de naturel. C'est un topoï dans l'anticipation ancienne que l'on retrouve décliné par exemple dans Nouvelles de l'avenir de Joseph Méry ( vers 1845) ou dans Un épisode de l'an 2000 ( 1897, texte disponible gratuitement sur ArchéoSF les textes).

LES PLAISIRS DE LA CAMPAGNE
SOUVENIRS DE 2912

Nous n'étions plus très jeunes, Garwell, Flint et moi. Mais l'orgueil de notre vieillesse et sa joie légitime étaient de nous réunir plusieurs fois par semaine pour deviser des choses du passé, ce passé de notre adolescence où tout semblait merveilleux.
L'almanach électrique suspendu dans le studio de Garwell annonçait la date du 7 novembre 2950. Cela ne nous rajeunissait pas, car Garwell était né en 2895, Flint en 2897 et moi en 2899. Nous nous suivions de près, et c'est pourquoi nous nous aimions comme de vrais camarades.
Ce soir-là, donc, un peu d'amertume se mêlait à nos discussions sur les progrès incessants de la civilisation. Flint soutenait que l'on ne pouvait pas vivre sous l'eau sans le secours d'appareils, ni plonger dans les grandes profondeurs sans craindre les vexations de la pesanteur. Pourtant, des hommes se promenaient, sur le fond de la mer avec une aisance de langouste, et Garwell, avec un soupir, fut obligé de convenir que Flint radotait, comme tous ces vieux bonshommes qui nient l'évidence même.
De là à se vautrer dans les souvenirs de jeunesse, il n'y eut qu'un pas.
Cornebleu ! jura Garwell, ces inventions nouvelles, où cela mène-t-il, triple-dieu ! Jadis, on ne jouait pas au poisson ; il nous restait encore quelques mystères dans un coin de la pensée. Maintenant, il n'y a même plus un lambeau de campagne digne de ce nom.
« Je me souviens des parties fines d'autrefois avec ma petite amie, à cette époque savait s'amuser en ce temps-là. Pas de Minnie Dropp. Ah ! mille diables ! qu'on plaisirs compliqués, non ; pas de promenades au fond de l'eau ou au centre de la terre, mais la bonne et saine campagne : la Nature tout simplement, la Nature toute nue, telle qu'elle était alors, avant le progrès, bien entendu.
« Je me souviens d'une excursion que nous fîmes en Picardie, Minnie et moi. C'était en quelque sorte un voyage de noces et puis une occasion de respirer un peu cet air pur qui, alors, n'était pas fabriqué par les usines intermondiales. Nous prîmes le tube pneumatique, à la bonne franquette, et ça valait bien, à mon avis, vos odieux transports instantanés par les ondes électriques. En vingt minutes, Minnie et moi fûmes introduits dans le tube et poussés jusqu'en Picardie, mon pays natal. Un peu fripés par le voyage, nous nous secouâmes le long d'un champ pavé en bois, et qui avait été aménagé pour permettre aux chevaux de labour de porter des sabots à roulettes. Dieu, que c'était beau ! A droite et à gauche, des arbres fruitiers rangés au cordeau et; des champs de salades, de choux et d'oseille à perte de vue. Maintenant, il n'y a plus de champs de salades, de choux et d'oseille, nous avons de la salade chimique, des choux chimiques et de l'oseille chimique. C'est le progrès, n'est-ce pas. De vrais moutons mille pattes — un croisement curieux donnant une moyenne de 60 gigots par tête — broutaient çà et là des herbes cuites ; une eau stérilisée gazouillait dans un ravin en zinc. Minnie, grisée par l'oeuvre du Créateur, frappait dans ses mains et sautait comme une enfant.
Heureux temps !
« Oui, mes camarades, nous savions nous amuser, et la campagne n'était pas une fiction. Elle offrait des distractions qui reposaient l'esprit du tumulte des villes. C'est ainsi qu'en traversant une plantation de jeunes poteaux télégraphiques, nous nous trouvâmes devant un parc d'attractions : le Luna-Picardic-Magic-Etablissement. — « Allons-y ! » demanda Minnie. Nous entrâmes et, Dieu ! ce que nous vîmes de choses rares ! Il y avait de tout, tout ce qu'on peut rêver à la campagne.
« Dans un clos entouré de ronces métalliques, moyennant 10 francs, les dames éprises d'émotions fortes pouvaient se faire poursuivre par une vraie vache. Il fallait les entendre crier ! Plus loin, moyennant 20 francs, on mettait à votre disposition un mètre carré de gazon et là, pendant une demi-heure, on pouvait se rouler sur l'herbe, de droite à gauche et de gauche à droite. Encore avec un supplément de 40 francs, on entendait dans un phonographe pépier de vrais oiseaux qui vivaient vers 1910. C'était vraiment intéressant. Plus loin, toujours plus loin, avec 50 francs seulement, on pouvait entrer sous une cloche de verre et s'asseoir sur un vrai nid de fourmis. Minnie fut enthousiasmée. Cette promenade resta toujours gravée dans sa mémoire et la petite y pensait encore quelques jours avant de mourir. Oui, je le répète, c'était le bon temps, conclut tristement Garwell. Les hommes de ma génération n'allaient pas chercher midi à quatorze heures, ils vivaient simplement, et tout allait pour le mieux.»
Nous hochâmes la tête et attendîmes qu'une onde électrique qui desservait notre quartier nous transportât dans notre lit.

Pierre Mac Orlan, in Le Journal Amusant, n° 493, 21 octobre 1928

Image : Portrait de Pierre Mac Orlan
Pour en savoir plus: le site du Comité Pierre Mac Orlan

jeudi 26 décembre 2013

Jules Lermina : Bavardage ( sur le futur ) ,1910



Jules Lermina a produit quelques textes de science fiction et des textes fantastiques aux côtés d'une importante oeuvre romanesque tendant vers le socialisme avec notamment des suites d'Alexandre Dumas ou d'Eugène Sue.
On trouve dans un numéro du quotidien L'Aurore ce "bavardage" dans lequel Jules Lermina se demande : "Que sera le monde de demain ?". Rappelons la proximité de Jules Lermina avec les milieux socialistes et anarchistes et que L'Aurore accueillait Zola, Clémenceau, etc.

Bavardage

Que sera le monde de demain ? Les utopistes d'autrefois ont toujours tablé sur le connu, pour le développer, l'améliorer, l'idéaliser. Que ce soit la République de Platon, la Cité du soleil de Campanella, l'Utopie de Thomas Morus, les fantaisies de Voltaire et dans des temps plus récents la Cité future, l'An 2000 de Bellamy et tant d'autres dont la liste serait interminable, on a toujours tablé sur les faits actuels ou les institutions existantes pour bâtir un système qui n'était après tout qu'une sorte d'épanouissement de ce qui était en ce qui peut être.
Aujourd'hui, il semble bien qu'il n'en soit pas de même et, en dépit des détracteurs du temps présent, il est bien difficile de ne pas avouer qu'un monde nouveau commence, scientifiquement, industriellement si dissemblable du passé que tout point de repère nous manque pour imaginer l'avenir.
L'aviation, dans la catégorie des conquêtes physiques, le radium, dans le domaine des sciences naturelles nous ouvrent des horizons tellement imprévus que même avec l'irnagination la plus envolée il est impossible de deviner ce que ces découvertes peuvent produire de changements, dans la vie sociale, dans les rapports des peuples entiers, dans la carte au monde, dans la configuration géographique de la terre.
Nos fils seront-ils plus heureux que nous ? C'est notre espoir, mais comme ce qui se modifiera le moins sera la mauvaiseté humaine, nous en sommes à nous demander si tous ces progrès ne seront pas exploités pour rendre plus âpre, plus féroce la lutte pour la vie et pour la domination.
Plus de frontières, c'est-à-dire plus de guerres plus de compétitions farouches pour un bout de terrain, €”plus de douanes, la production universelle servant à satisfaire les besoins de tous. sans monopole national, sans accaparement, et produisant le bien-être pour tous. Ce serait trop beau, comme aussi cette pensée nous éblouit de toutes les forces motrices produites par la matière elle-même par la radio-activité, domestiquée et mise au service de l'effort humain, réduit à un rôle de direction et d'intellectualité.
Voilà le rêve que peuvent former les utopistes d'aujourd'hui : mais ne sont-ils pas arrêtés par cette conviction que demain apportera encore des découvertes nouvelles, dont nous ne pouvons avoir aucune précision ? Qui sait si l'X de demain ne bouleversera pas toutes les notions acquises, de telle sorte que nous soyons pour les vivants futurs les hommes d'avant cet X, c'est-à-dire des sortes d'ignorants et de sauvages, comme nous disons aujourd'hui les préhistoriques ou les hommes du moyen âge.
Dormir mille ans -€” et se réveiller en l'an 3000, ce que très certainement, nous aurions l'air d'imbéciles ! Cette certitude rabat un peu notre caquet, pas vrai !


Jules LERMINA in L'Aurore, n° 4659, 10 août 1910

Image : Jules Lermina

Pour en savoir plus:
L'Effrayante aventure de Jules Lermina
Biographie de Jules Lermina
Bibliographie de Jules Lermina ( fantastique et SF)



mardi 19 novembre 2013

Gustave Le Bozec. L'Homme et ses Dieux (1930)

En 1930 paraissait L'Homme et ses Dieux de Gustave le Bozec. Comme de nombreux auteurs publiés par les éditions Figuière, on ne sait à peu près rien de lui. Un détail qui peut intéresser les amateurs, mon exemplaire contient une carte agrafée "Hommage de l'auteur" avec le nom de Gustave Le Bozec et la mention Constantine. 
Quelques critiques parurent dans la presse de l'époque comme celle-ci résumant l'ouvrage:

Gustave Le Bozec. L'Homme et ses Dieux. Roman. Paris, Figuière

Nous sommes en 1998, l'âge de la science, des autoplanes, des radiations de tous genres. Constantine est devenue le nombril du monde, et Tamanrasset, avec ses palaces, une nouvelle Héliopolis. Mais ce roman d'anticipation nous réserve la plus déconcertante des surprises. Se précipitant à la recherche d'une femme trop aimée qu'une panne de son avion a précipitée dans les gorges du Rummel, le fameux savant Éric Lorvés se trouve enfermé avec elle dans un antre souterrain, où ils ont la stupeur d'être prisonniers d'un être étrange. Il se nomme et raconte en grec sa vie. Nurma est vieux de vingt-cinq siècles ayant capté le secret des mages égyptiens, il est immortel. Sa rencontre ne change rien à la situation qui est sans issue, et au désespoir du savant qui sait que, dans ce trio, il est de trop; qu'il mourra au jour que choisira la fantaisie de l'immortel. Par bonheur, l'appareil de son invention destiné à capter les bruits souterrains est resté en batterie dans le studio de Lorvés; ses amis entendent son appel, accourent au secours et à l'aide d'une perforatrice délivrent les prisonniers. Mais, pour se venger, Nurma a ouvert les vannes du barrage, et les eaux déchaînées entraînent Mérope Suarez. L'immortel s'y précipite à son tour pour échapper à la justice des mortels.
Sur ce thème, M. Le Bozec a brodé un récit d'aventures, qui fait songer à Jules Verne, sans être aussi inoffensif.


In revue Etudes, revue catholique d'intérêt général, Janvier 1931

lundi 11 novembre 2013

La guerre future : En 2050, commencera le cycle de la « machine-soldat (1928)

« LA GUERRE FUTURE »
En 2050, commencera le cycle de la « machine-soldat »

LONDRES, 10 novembre. Dans le dernier numéro de la revue anglaise « Siècle », le colonel britannique J.-C. Fuller, qui se distingua pendant la guerre dans un régiment de tanks, a fait de curieuses prévisions sur ce que pourrait être la guerre dans quelques centaines d'années.
D'après le colonel Fuller, l'histoire de la guerre peut se diviser en différents cycles. On a vu le cycle de la cavalerie, celui de l'infanterie, et nous en sommes aujourd'hui au cycle de l'artillerie.
Le colonel Fuller pense que ce dernier cycle guerrier durera jusqu'en 2050, après quoi on entrera dans le cycle de la machine humaine. Il prédit alors que l'homme-soldat sera remplacé par la « machine-soldat ».  
«L'élément humain, durant la guerre, fut la plus grande difficulté, déclare le colonel Fuller, car les soldats sont capables de désobéissance et de peur. Avec la machine humaine, dirigée par les ondes, on arrivera à la perfection sur le champ de bataille, et ce moyen de destruction sera absolument diabolique. »
On pourra sans doute diriger d'un bureau de Londres, une bataille en Asie centrale, et les moyens de destruction de cette nouvelle arme seront si terribles qu'ils amèneront la fin de toute guerre.

Mais cette ère de paix ne viendrait qu'en 2150.

Anonyme, Ouest-Eclair n° 9877, 11 novembre 1928

mercredi 6 novembre 2013

La photographie en 1991 ( 1891 )

En 1891, on imaginait l'avenir de la photographie...

UNE PROPHETIE
LA PHOTOGRAPHIE en 1991

Quand Jules Verne, préconisant la navigation sous-marine, publia ses Vingt mille lieues sous les mers, on fut unanime pour admirer l'ingénieuse conception du savant romancier, mais l'idée fut taxée d'utopie, et l'on se rappelle que la science, qui se dit sérieuse, réfuta doctement et déclara l'idée, scientifiquement, irréalisable.
Nous savons aujourd'hui qu'elle était possible, même matériellement, car elle germa, viy le jour et à l'heure présente le problème de la navigation sous-marine est bel et bien résolu (1).

Qui nous dit que les Cinq semaines en ballon, par certaines idées premières ne serviront pas, un jour,la cause de la dirigeabilité des ballons ; et puis, pourquoi le populaire écrivain n'émettrait-il pas un beau malin, ses idées en matière., de photographie en couleurs.
Que n'a-t-on écrit et discuté à propos de ce que nous appelons la pierre philosophale en photographie.
La Photographie en couleurs est-elle réalisable ?
Hippocrate dit oui, mais Gallien dit non.
Nous n'avons pas qualité pour intervenir dans le débat, mais nous estimons que le siècle du téléphone ne peut s'éteindre sans ajouter ce nouveau fleuron à sa couronne.
Dans tous les cas, au mois de juillet 1991, pour parler comme Mathieu Landsberg, la question sera résolue depuis longtemps, et nos arrière-neveux auront pour nos faibles moyens actuels, l'indulgente pitié que nous ressentons pour les soporifiques «pataches » de nos pères. Evidemment en l'an de grâce 1991, le métier de photographe, qui, déjà maintenant, ne vaut plus que de loin l'élevage des lapins, n'aura plus absolument de raison d'être.
La photographie fera partie de l'éducation de future humanité, et depuis le premier jusqu'au dernier, chacun s'en servira pour les besoins les plus usuels.
Evidemment, il serait téméraire de vouloir évoquer le degré de perfectionnement auquel sera porté alors l'outillage photographique, et les meilleurs instruments en usage à l'heure présente ne constitueront plus que d'ignobles rossignols que nos petits neveux retrouveront dûment catalogués dans quelque arrière salle du Musée de Cluny.
Dans cent ans, au jour de l'an, et par câble, on échangera sa photographie avec celle d'un ami fixé dans le voisinage du lac Tanganika ; ou bien, les pieds sur les chenets, on assistera à l'audition d'un opéra chanté à San-Francisco, tout en observant sur un écran la physionomie de la salle, le tout transmis par photogramme. (Est-ce un néologisme ?).
Nécessairement les procédés de reproduction d'après cliché photographique auront atteint le summum de la perfection, de la célérité et du bon marché ; aussi, dans les journaux, la majeure partie des compte-rendus sera remplacée par la reproduction visuelle des événements arrivés dans le monde entier, et qui arriveront régulièrement avant l'heure de la mise sous presse.
La quatrième page des journaux sera un véritable album à portraits, où les sujets des deux sexes, confiants en leur mine avantageuse, s'offriront au choix des bourgeois.
« Géraudel » jeune, en guise d'attestations parlantes, y publiera quelques portraits en partie double, figurant, le premier, un malade hâve et décharné, prêt à paraître devant son créateur; en regard, le même individu, gros, joufflu, d'une santé insolente, cette dernière vue prise à l'absorption de la cinquième pilule Géraudel fils et sucesseur.
On y relèvera des annonces dans le goût de celle-ci : « Fille de campagne, lait abondant (voir portrait) demande place. S'adresser à la Société anonyme des biberons de famille, et le lecteur à la vue de la plantureuse « nounou », ne pourra que regretter d'avoir dépassé l'âge de ce genre de.... consommation.
Plus loin une annonce ainsi conçue : « Industriel prendrait associé pour donner de l'extension à affaires très prospères. (Voir bilan). »
En regard on admirera la reproduction de la page du bilan accusant des bénéfices mirifiques.
De temps à autre, dame Justice vulgarisera de cette façon la physionomie d'un caissier parti en Villégiature, sans laisser d'adresse exacte.
Dans le domaine scientifique, quels merveilleux résultats n'obtiendra-t-on pas grâce à l'emploi des appareils perfectionnés qu'on construira à cette époque.
Nous savons aujourd'hui, nos savants astronomes nous l'assurent, que les planètes sont habitées ; dans cent ans, on s'en sera assuré depuis longtemps. (2)
Des instantographes forme torpille, seront lancés vers Saturne et Junon, et retomberont comme de vulgaires bilboquets recelant de fort intéressantes photographies prises dans ces régions éthérées.
C'est vers cette époque que surgira un inventeur qui se chargera du mot de la fin.
Celui-ci imaginera notamment un appareil qu'il ne s'agira plus que de remonter et lequel, automatiquement, prendra les vues.... qui lui paraîtront intéressantes, qui les développera, les fixera et en tirera un certain nombre d'épreuves, et ces dernières s'échapperont de l'appareil virées et... retouchées si besoin. (3)
Ce sera l'âge d'or de la photographie et des perfectionnements ultérieurs ne seront plus que très hypothétiques.
Après tout, qui sait. (4)

LÉONO, « La Photographie en 1991 », in Les Annales photographiques : journal populaire de photographie illustré, n° 29, juillet 1891

(1) Nos lecteurs ont tous, présentes à l'esprit, les expériences du Goubet, bateau sous-marin qui porte le nom de son inventeur, et connaissent l'admiration unanime de notre corps maritime pour ce merveilleux petit navire. (NDLR)
(2) Ce jour-là, le prix de 100.000 francs que Mme Ve G. de Pau, vient de mettre à la disposition de l'Institut pour récompenser l'inventeur du moyen le plus commode pour converser avec les astres, aura enfin trouvé son emploi.
(3) Une légère modification de l'appareil d'Enjalbert et le tour sera joué (NDLR).

(4) Hélios belge.

Illustration (qui n'a rien à voir avec le texte!), Marius Larique, La Photo qui parle, collection Progrès, éditions Rouff, sans date.

vendredi 1 novembre 2013

vendredi 25 octobre 2013

Transport du futur 4 ( 1936 )

Un bateau qui intègre un quai pour de plus petits bateaux ( 1936, dessin Gyosui Suzuki)


Source: pinktentacle.com

jeudi 24 octobre 2013

Point ne tueras de Maurice Elvey ( 1929 )

Le cinéma d'anticipation est aussi vieux que le cinématographe de fiction.
En 1929, Maurice Elvey réalise Point ne tueras ( High Treason ), un film parlant (aussi diffusé en version muette car les salles n'étaient pas forcément équipées pour le son). Cette anticipation (l'action se déroule en 1950 dans la version anglaise et en 1995 dans la version française) pacifiste est décrite ainsi dans les colonnes du journal socialiste Le Populaire:

Point ne tueras, film anglais, qui se passe en 1950, alors que les Etats-Unis d'Europe sont menacés d'une guerre avec les Etats-Unis d'Atlantique, parce que le président du premier de ces groupes a peur d'une attaque de l'étranger et que des pourvoyeurs de munitions suscitent des incidents un peu partout. Ils ont même fait sauter le tunnel sous la Manche. Il y a bien un conseil de direction d'Europe, mais les votes pour et contre la guerre s'équilibrent, la voix du président est prépondérante.

Le président de la Ligue mondiale de la Paix empêche la guerre en tuant le président de l'Europe. On le condamne à mort avec regret, mais on le condamne à mort.
Sans doute la puissance cinématographique est-elle là simplement relative, mais l'ensemble est plus que sympathique et, s'il n'y avait pas une petite intrigue amoureuse entre deux jeunes gens de conceptions sociales, opposées, le scénario serait parfait.
Il n'en reste pas moins un ouvrage qui a de grands mérites. (Claude Jouet, Le Populaire, 10 janvier 1930)
On trouvera d'autres critiques cinématographiques du film sur la page Wikipédia consacrée à Point ne tueras. La plupart compare le film à Metropolis de Fritz Lang.


mardi 22 octobre 2013

La mode en l'an 2000 ( 1898)

Le Supplément, grand journal littéraire illustré, daté du 30 juin 1890 proposait en première page une "causerie" nourrie par des dessins et propositions de lecteurs imaginant la mode en l'an 2000. Voici ce que cela donnait:


CAUSERIE
Modes Fin-prochain Siècle

Ah ! qu'elles seront originales et diverses, les modes de l'an 2000, si j'en crois tes couturiers-amateurs et les couturières-amat...euses qui se sont efforcés de m'en offrir un avant-goût.
Vous n'avez pas oublié ce dont il s'agissait ?
« En supposant, disais-je, qu'il devienne indispensable de modifier du tout au tout l'accoutrement moderne et qu'on vous demandât votre avis sur celui qu'il conviendrait dorénavant d'adopter, quel modèle proposeriez-vous ?» D'aucuns, il est vrai, semblent avoir reculé devant une révolution trop radicale et beaucoup de projets rappellent encore l'incommode routine de notre actuel accoutrement.
Un grand nombre de correspondants estiment sans doute qu'il doit suffire d'améliorer les parties défectueuses de notre coutumière défroque sans sacrifier complètement des atours auxquels l'accoutumance les attache plus qu'ils ne croient eux-mêmes.
Ainsi M. J. Saint-Leu se contenterait de supprimer le corset - pleurez, gentes corsetières ! - et de le remplacer par « une fine ceinture de soie ou d'autre étoffe très large, moulant bien mieux la taille que cet instrument de torture Moyen Age ! »
On ne s'attendait guère à voir le Moyen Age en cette affaire ; le corset, chez M. Saint-Leu, n'est-il pas bien plutôt un instrument idoine à l'âge... mûr?
Le même réformateur réduirait la jupe aux dimensions d'une pièce d'étoffe, une-petite pièce, sans doute, quelque chose comme un lever de rideau) « rattachée à la hanche par un gros nœud ».
Le croquis ci-joint accompagne et complète ces indications Pour un si hardi simplificateur, on trouvera peut-être que M. J. Saint-Leu aurait pu donner plus de simplicité à la coiffure de son modèle ! ! !



Une de mes assidues lectrices, madame ou mademoiselle Stéphane d'Armant, proclame au contraire l'utilité du corset qu'elle considère comme indispensable à la toilette de notre sexe. Chacun, comme on dit, prêche pour son sein ! Du reste madame ou mademoiselle Stéphane d'Armant professe des sentiments très conservateurs. Son idéal de costume féminin ne va guère plus loin que le court jupon, le boléro et la toque de nos modernes cyclewomen, Pour la tenue de « ces vilains singes que l'on appelle des hommes » (saluez, messieurs) moins de changements encore, La mode d'aujourd'hui, leur convient à merveille. On n'est pas plus centre-gauche !
Moins accommodant est Coco-Bel Œil qui, lui, devant l'envahissement inquiétant des automobiles écrabouilleurs, préconise un « vulgaire enroulement de pneumatiques increvables depuis les pieds jusqu'à la tête ! » Et le petit bâton blanc de M. Lépine ou le petit bâton d'épine de Monsieur Blanc, pour compléter la sécurité de ce costume aussi sommaire qu'inédit. A en juger par le croquis ci-joint, cela ne manquerait pas, en effet,d'un certain pittoresque !



Je ne saurais trop remercier P'tit-AIi de son assiduité à me répondre, mais je l'ai trouvé bien timide, cette fois.
Toute initiative en cette matière semble l'effrayer et il pourrait disputer à Stéphane d'Armant le record du statu quo.
Pour les femmes il souhaite seulement plus de souplesse dans le corsage — une veste bouffante analogue à celle de nos marins (ça sent le bateau!) ouvrant par deux empiècements sur un maillot-corset — et moins d'ampleur dans la jupe coupée à hauteur du genou. C'est je vêtement de lawn-tennis tout pur!
Pour les hommes P'tit-Mi s'en tient à l'uniforme du parfait pédard couronné d'un bien inattendu « chapeau de mousquetaire » (???).
Ousqu'est mon... mousquet ?
Encore un conservateur: M. Achill se persuade que tout est pour le mieux dans la meilleure des modes. Il trouve même des charmes au chapeau haut de forme qui, prétend-il, exerce sur les femmes une invincible séduction! Serait-ce parce qu'il est en poil de lapin ? Si vraiment nos arrière-petites-nièces de l'an 2000 arborent le costume qu'il a dessiné à leur intention, elles ne différeront pas sensiblement de leurs arrière-grand'tantes!



Tous ces projets laissent en résumé le problème stationnaire ; celui de M. Maurice le fait rétrogader! Ce novateur à rebours voudrait que chacun se nippât à sa fantaisie en fouillant dans la friperie rétrospective des ancêtres! Les chauves s'affubleraient de la perruque Louis XIV, les grands pieds se chausseraient à la poulaine... le reste à l'avenant. Mais, illogique à son propre point de vue, M. Maurice n'admet point que les jolies femmes poussent le goût de l'antique jusqu'à en revenir à la chaste nudité de notre mère Eve. « Que deviendrait, écrit-il, le désir, le suprême désir, si nous voyions à chaque instant tous les secrets trésors qui font votre beauté s'étaler à nos yeux, Mesdames ? »
Que deviendrait le désir, monsieur... ?
Il deviendrait... réalisé et ce n'est parfois pas désagréable, pour vous, je pense.
Mais passons rapidement à de plus audacieuses conceptions.
L'une des plus heureuses est, à mon humble avis, celle de Bichette : le costume-automobile. Il est tout à fait adéquat aux incessants progrès de la locomotion mécanique, et la forme sous laquelle sa créatrice l'a imaginé sort au moins des banalités courantes.
On en jugera par le graphique qu'elle en a tracé elle-même et qui nous dispense de toute complétive description.



Mac-Hokott est aussi bien inspiré, je le crois, en prophétisant le « vêtement mobilier et immobilier, sorte de carapace portative qui tiendra lieu à son porteur de maison, de lit, de table, de chaise, de bibliothèque et de garde manger » ! Alors se réalisera, sans métaphore, la devise du sage, qui. n'était peut-être qu'un escargot: Omnia mecum porto ! Il est regrettable que MacHokott n'ait pas appuyé son idée magnifique d'un croquis capable de la faire passer du domaine de la théorie dans celui de la pratique.
Enfin j'ai gardé, pour conclure, la géniale invention du bien nommé A. R. O.Noth : l'habit-ballon dirigeable, se gonflant et se dégonflant à volonté ! Il ne paraît pas qu'on puisse imaginer rien de plus commode et à la fois de plus élégant.



Heureux nos descendants qui, d'un coup de pompe à air, pourront ainsi s'élever au-dessus du niveau des vaines querelles humaines et planer dans le pur éther, où leur présence rehaussera la majesté des espaces célestes !
Mais vous verrez qu'il se trouvera encore des grincheux pour traiter cela d'utopie !
Paméla,
Marchande de frivolités


vendredi 18 octobre 2013

mercredi 16 octobre 2013

L'aérocar de Paris à Saint Denis de Francis Laur (1923)

Francis Laur imagina une ligne d'aérocars entre Paris et Saint Denis dont les plans et documentations furent publiés en 1923. L'Illustration et divers autres périodiques en parlèrent en 1923-1924. En 1927 le projet était toujours à l'étude... mais il ne vit jamais le jour...
Il reste des jouets comme celui-ci (vendu à la Samaritaine en 1933):




lundi 14 octobre 2013

Enigme du lundi : que sont en train d'admirer les deux piétons ?

Nous reprenons nos énigmes du lundi avec une question dont la réponse est facile (enfin, me semble-t-il!)
Merci à Pierre qui m'a transmis cette photo d'archive.
Tout est dans le titre !



vendredi 11 octobre 2013

jeudi 10 octobre 2013

Base lunaire 1 ( 1959 )

En 1959, nul être humain n'avait voyagé dans l'espace. On imaginait pourtant déjà des stations lunaires avec ces dessins qui laissent songeur un demi-siècle plus tard...



Science et Vie n° 499, avril 1959.

mercredi 9 octobre 2013

Jack London, La Peste écarlate ( 1924 )

Quand on prononce le nom de Jack London, diverses oeuvres viennent immédiatement à l'esprit, réminiscences de lecture scolaires comme Croc-Blanc, L'Appel de la forêt, Martin Eden, Les Vagabonds du rail (une lecture de collège conseillé par un professeur de français...),...
CouverturePersonnellement mon premier contact avec cet auteur fut non pas une histoire avec des animaux comme Jerry chien des îles ou Michael chien de cirque mais Le Fils du Soleil dans une ancienne Bibliothèque Verte cartonnée (qui avait déjà perdu sa jaquette), une histoire des mers du sud, avant de me lancer dans la lecture des histoires du Grand Nord ou de "routards".
Pourquoi mentionner Jack London sur ArchéoSF? Parce qu'il est l'auteur de plusieurs anticipations socialistes dans lesquelles il défend ses idées de progrès et de changements sociaux.
Ainsi Le Talon de fer (1908) est-il un roman considéré comme l'une des premières dystopies de l'histoire, Avant Adam plonge dans la préhistoire ou la Peste écarlate est-elle une anticipation apocalyptique se déroulant en... 2013 !

L'ouvrage publié en anglais en 1912 a été édité en 1924 en français et la presse de l'époque a produit quelques chroniques comme celle-ci:

La peste écarlate
Par Jack London

Traduit de l'anglais . par Paul- Grayer et Louis Postif G. Crès et Cie, éditeurs
Les lecteurs du Figaro, qui suivent avec un intérêt croissant, la publication dans nos feuilletons du Vagabond des étoiles, con­naissent et apprécient le génie puissant et troublant de Jack London.
Le présent volume comprend trois des œuvres les plus remarquables de l’illustre écrivain américain : un roman très court et deux contes.
La Peste écarlate est une étrange et très simple histoire qui se déroule en l’an 2073. Soixante années auparavant, en 2013, un fléau foudroyant, une maladie mystérieuse que la science n'a pas su vaincre, a détruit le monde et à peu près anéanti l’humanité.
Quelques dizaines d’individus, sur la terre entière, ont seuls survécu à cette effroyable catastrophe. Le dernier de ces « rescapés », vieillard plus qu’octogénaire, raconte à ses petits-enfants, en une suite de tableaux d’un tragique poignant, l’atroce agonie des peuples qui, certains de leur fin prochaine, donnant libre cours à leurs instincts effré­nés, s’écroulent au milieu des incendies, des pillages et des meurtres.
L’homme qui, maître de notre planète, fut jadis un vrai dieu, est retourné après le cataclysme à son primitif état de sauvagerie. Mais il se multiplie rapidement. Dé­jà, après soixante ans, trois ou quatre cents de ses descendants peuplent le globe. Dans, quelques centaines de générations « la mê­me histoire recommencera ». Les hommes, devenus très nombreux, se battront et s’entretueront, et « c’est par le feu et par le sang qu’une nouvelle civilisation se formera ». Telle est, en guise de conclusion, la prophé­tie de l’Ancêtre.
Construire un feu est une nouvelle du Klondike, du pays de l’or. C’est un drame angoissant, qui n’a que deux acteurs : un homme et un chien. La puissance, la simplicité, la netteté du style du conteur pres­tigieux apparaissent en ce récit, qui n’a que 45 pages, plus et mieux peut-être que dans toutes les autres oeuvres de Jack London. Et ces qualités sont, mises en valeur, ici comme dans La Peste écarlate, par une tra­duction d’une rare fidélité et d’une excel­lente ténue littéraire.
Le conte qui termine le livre : Comment disparut Marc O'Brien, est inspiré par un amour spécial, auquel les lecteurs français ont quelque peine à se faire. Mais le récit est d’une étonnante vivacité, que MM.. Paul Graver et Louis Postif, traducteurs, ont rendue à merveille.


Le Figaro, Supplément littéraire du dimanche, n° 279, 9 août 1924

A consulter: le site Jack London qui est incontestablement le plus complet en français

vendredi 4 octobre 2013

Transport du futur 1 ( 1936 )

En 1936, le magazine Shonen Club publia un article abondamment illustré intitulé Les Transports du futur.

Episode 1: Le monorail des montagnes par Kikuzō Itō


Source: pinktentacle.com

jeudi 3 octobre 2013

Frères Cogniard, En 1840 et 1940 (1840)

La semaine dernière, j'évoquais l'anticipation féministe En 2013. Cette pièce de théâtre ne semble avoir laissé aucune trace. Peut-être le livret dort-il au fond d'une bibliothèque...
Voici une autre oeuvre théâtrale, une revue comme on en faisait au XIXème siècle, dont l'intérêt dramatique était soutenue par une machinerie complexe et impressionnante pour l'époque.
Ce qui est amusant ici c'est que l'oeuvre des frères Cogniard datant de 1840 est rappelée un demi-siècle plus tard au sujet d'une nouveauté en 1897, nouveauté dont on n'apprendra pas grand chose dans cet article...


Les Variétés vont donner, dans quelques jours, leur revue annuelle, Paris qui marche, et ainsi que le titre l’indique, l'automobilisme et les divers au­tres moyens de locomotion parisienne doivent jouer un certain rôle dans l’affaire.
Or, il y a tout bonnement cinquante-sept ans, en l'an de grâce 1840, on donnait à la Porte-Saint-Martin, une revue des frères Cogniard, intitulée 1840 et 1940. où précisément la question de locomotion était une des curiosités de la pièce.
En ce temps-là, on jouait volontiers des revues à la Porte-Saint-Martin, qui n’était pas exclusivement consacrée au drame, et parmi celles-ci, 1840 et 1940 a compté comme un grand succès, et laissé une répu­tation de célébrité. Le sujet en était, d’ailleurs, des plus ingénieux, on y passait en revue, Paris en 1840, c’est-à-dire l’année même où on jouait la pièce, et Paris en 1940, c’est-à-dire cent ans après. .
Or, en 1840, les chemins de fer étaient à peine vul­garisés, presque de création nouvelle ; il n’y avait encore que quelques lignes installées et de court tra­jet ; aussi le « clou » de la revue, c’était de faire voir les Parisiens de 1940 se promenant sur le boulevard grimpés sur de petites locomotives qu’ils condui­saient eux-mêmes, les chevaux ayant été supprimés.
Que dites-vous de l’à-propos ? Voilà qu’à peine un demi-siècle s’est écoulé et déjà cette fantaisie soit-disant irréalisable, et qui faisait rêver nos pères, s’est réalisée, car, en résumé, les automobiles ce sont bien les petites locomotives personnelles prévues en 1840.

***

Dans cette même revue, deux ballons dirigeables se croisaient dans les airs, montés par deux jeunes « incroyables », deux « lions », disait-on alors.
Eh quoi, Gaston, sorti d’aussi bonne heure; il est à peine neuf heures du matin? criait un des aéronautes à son voisin, en le croisant au passage.
Ne m’en parle pas, Gaétan, répliquait l’autre, j’ai des amis à déjeuner et les cigares de la Régie sont si mauvais (déjà!) que je vais acheter quelques puros à la Havane. Mais ne me retarde pas, il est neuf heures et demie, et il faut que je sois rentré avant midi. A tantôt, au revoir!
Et les deux ballons partaient, chacun de son côté; à la grande joie du public.
Rien ne prouve, au train dont vont les choses, qu’en 1940, on n’ira pas en ballon chercher des ci­gares à la Havane, 1e matin, lorsqu’on aura des amis à déjeuner.
Il semble que rien ne soit impossible, d'autant mieux que, dans cinquante ans, tout porte à croire que les cigares de la Régie seront encore aussi mauvais qu'aujourd'hui.

Le Gaulois, n° 5831, 28 octobre 1897

En 1840 et 1940 a été jouée en 1841 (et s'en trouvée intitulée En 1841 et 1941). S'agit-il d'une erreur du rédacteur du Gaulois? ou bien y-a-t-il eu deux saisons? Toujours est-il que Joseph Méry a proposé une critique de cette revue ( à lire sur ArchéoSF)